samedi 3 mars 2012

René Benjamin


La désormais riche collection Qui suis-je ?, cet automne, outre le Maurras de Tony Kunter, a publié, sous la plume de Xavier Soleil, un René Benjamin, un nom qui, malheureusement, ne doit pas dire grand-chose à nos jeunes générations. Mais c’est précisément tout l’intérêt de cette collection que de redonner une visibilité et, par voie de conséquence, une lisibilité à des auteurs qui les ont perdues non pas par manque de talent — ce ne saurait être évidemment le cas de René Benjamin  — mais parce qu’ils ont eu le malheur de déplaire aux puissants du jour.
René Benjamin, né le 20 mars 1880 à Paris, fait partie de ceux-là. Journaliste, chroniqueur, biographe, dramaturge, romancier à la Balzac dans sa volonté de croquer la société de son temps — à travers la justice notamment —, ayant reçu en 1915 le prix Goncourt pour Gaspard qu'il écrivit en convalescence après avoir été gravement blessé dès le début des hostilités, roman qui « peignait l’illusion, le chant du coq gaulois, cet imbécile, la vantardise du départ », il fut aussi un conférencier de talent, en butte à l’hostilité d’une gauche aussi ennemie qu’aujourd’hui de la liberté d’expression ...si bien que les camelots du Roi durent plus d’une fois assurer la sécurité de ses causeries, jusqu’à y laisser, un soir, à Lyon, l’un d’entre eux sur le pavé. C’est que René Benjamin était un ami de l’Action française, de Maurras et de Daudet. Il écrivit en 1932 un remarquable Charles Maurras, ce fils de la mer
Admirateur également, pèle-mêle, de Barrès, Joffre, Molière et Sacha Guitry, fin connaisseur de la personnalité de Mussolini, son engagement très actif en faveur du Maréchal Pétain en 1940 lui valut d’être “épuré” à la Libération. Et enfermé durant un an.
A sa mort précoce, le 4 octobre 1948, à Tours, Maurras écrit : « Quelqu’un qui l’a bien connu et admiré me dit que René Benjamin ne pouvait plus vivre. Exactement, son cœur, qui était tout lui-même, ne survivait pas à L’Enfant tué [RB. perdit un fils  à la guerre en 1945 et écrivit ce livre en témoignage], au cœur de son cœur, mais c’est ainsi que l’écrivain saura durer en nous. [...] D’un pas glissant, mais ferme, il s’est évanoui dans le mystère et le silence de ce qu’il avait trop aimé. »

Xavier Soleil, René Benjamin, Qui suis-je ? Editions Pardès, 12 euros.